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lundi 31 mai 2010

De l'opportunité des rencontres du G-8 et du G-20

Un ensemble de circonstances m’ont tenu éloigné de mon blogue depuis plusieurs semaines. Ce qui ne signifie aucunement une perte d’intérêt de ma part.


Il se dit et s’écrit beaucoup de choses sur le milliard de dollars que coûtera la rencontre des G-8 et G-20 à Huntsville et à Toronto. Au nom des coûts exorbitants de la sécurité, certains remettent même en cause l’utilité de telles rencontres. La réflexion me semble mal engagée.

S’il y a une chose que j’ai apprise de mes années de pratique des relations publiques, c’est que la forme de communication la plus efficace entre les personnes est la rencontre face à face. Tout le reste, des correspondances par pigeon voyageur aux vidéo conférences, a été inventé pour compenser l’impossibilité de toujours rencontrer en direct les personnes avec qui nous devons communiquer.

La communication verbale, c’est bien connu, ne véhicule qu’une partie du message. Le non-verbal véhicule très souvent des messages aussi importants que les mots. La vidéo conférence compense en partie seulement. Le charisme d’une personne ne peut être véritablement éprouvé que dans le cadre d’une rencontre. Les «atomes crochus» ne connectent jamais aussi bien qu’en direct.

S’il en était autrement, les politiciens ne s’astreindraient pas à des campagnes électorales épuisantes visant à leur permettre de serrer le plus de mains possibles, de rencontrer directement leurs électeurs. Les journalistes n’auraient pas à se déplacer sur les lieux des événements qu’ils couvrent. Et tous les spectacles en salle, du théâtre aux concerts rock, auraient disparus depuis longtemps. Pourquoi faire tout cela alors qu’il est si simple et souvent moins risqué de «performer» devant une caméra?

Les rencontres comme celles du G-8 et du G-20 servent d’abord et avant tout aux dirigeants à nouer des relations personnelles, à s’apprécier directement les uns les autres. Cela est aussi important que tout le travail sur les dossiers, dont l’essentiel a la plupart du temps été réglé par les «sherpas» avant la rencontre. Les communications entre chefs d’État tout au long de l’année seront d’autant plus efficaces qu’ils auront bénéficiés de ces fenêtres privilégiées pour échanger face à face.

Le coût de la sécurité des sommets de Huntsville et de Toronto est-il trop élevé? Les analystes et les journalistes nous le diront. Toutefois, si c’est le cas, il faut réduire les coûts et non éliminer les rencontres. Un aspect beaucoup plus préoccupant à mon avis est soulevé par les analystes qui soulignent que le programme des rencontres devient surchargé au point où les entretiens bilatéraux ou en petit groupe des chefs d’État deviennent impossibles. Si tel est le cas, il faut agir pour placer au cœur de ces programmes ces moments privilégiées qui en constituent la principale raison d’être.

vendredi 7 mai 2010

Les relations publiques et le «Climategate»

Il y a quelques mois, des scientifiques américains et britanniques ont été soupçonnés d’avoir trafiqué des données pour justifier les thèses du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur les changements climatiques. Les résultats de trois enquêtes indépendantes viennent de les blanchir et selon le compte-rendu qu’en fait l’Agence Science-Presse, «les accusations d’inconduite scientifique ne reposaient sur rien. Les leçons qui émergent de cette controverse sont ailleurs : un déficit de relations publiques de la part des scientifiques, qui ont sous-estimé l’ampleur que pouvaient prendre ces accusations» est en cause.


«Le mot-clef «transparence» ressort des trois rapports d’enquête» peut-on encore lire dans cet article. Plus de 95 % des données sur le climat étaient déjà du domaine public, la controverse aura permis de rendre public l’autre 5 %.

La climatologue Judith Curry est citée : «Passez du temps sur la blogosphère pour vous faire une idée des questions politiques entourant votre domaine… Améliorez vos talents de communicateurs; nous avons tous besoin de communiquer plus efficacement.»

Ce n’est pas la première fois que l’importance de relations publiques efficaces est mise en relief… par leur insuffisance. Ces trois études révèlent qu’elles sont aussi importantes dans le domaine scientifique que partout ailleurs en société.

Les scientifiques ne sont pas toujours les clients les plus faciles. Ils ont trop souvent tendance à croire qu’il est impossible de résumer leur pensée sans la trahir. Il y a des exceptions, mais pour un Hubert Reeves on trouve combien de scientifiques imperméables à la vulgarisation? Raison de plus pour que des relationnistes professionnels s’en préoccupent.

Il y a une place à prendre pour les relationnistes dans les organismes scientifiques. Ceux-ci ont de multiples avantages à mieux se faire connaître, notamment celui de soutenir leur notoriété, toujours utile dans la course aux subventions. Aussi bien ces organismes que les scientifiques eux-mêmes ont tout avantage à mieux faire connaître leurs travaux.

SOURCE : Le Devoir, 67 mai, page A5.

Deux des études citées sont d’origine Britannique et ont été réalisées l’une par un comité de la Chambre des communes et l’autre par la Société Royale. La troisième a été réalisée par l’Université de Pennsylvanie, aux États-Unis.

mercredi 5 mai 2010

Remède à l'immobilisme Montréalais: consulter PLUS et non MOINS

Je réagis à un billet du collègue Pierre Bouchard (http://pierre-bouchard.com/?p=409&cpage=1#comment-7179) qui explique comment un de ses clients ressort totalement frustré du processus de consultation publique de la ville de Montréal. Comment ne pas le comprendre? La ville exige un véritable parcours du combattant s’étirant sur plusieurs mois et parfois plusieurs années. Lorsque les projets arrivent enfin à l’étape de la consultation publique officielle, ils sont déjà lourdement ficelés, on y a investi beaucoup de temps et d’argent. Il demeure toujours possible de les modifier, mais cela devient coûteux et surtout très frustrant.


La réaction classique – et compréhensible - des personnes aux prises avec cette situation sera de décrier les processus de consultation et de refuser d’y participer. Je propose de faire exactement le contraire et de consulter PLUS.

Ma suggestion est la suivante. Les promoteurs devraient structurer leur propre processus de consultation en parallèle avec celui exigé par la ville plutôt que de subir le processus municipal. Ce processus commencerait beaucoup plus tôt que le processus municipal, avant même que le projet soit totalement défini, au moment où la marge de manœuvre pour les ajustements est la plus grande. Il n’est pas interdit de présenter un projet à l’étape des intentions. Cela permettrait, d’une part, de prendre connaissance des attentes du milieu et de les incorporer immédiatement dans le projet et d’autre part de prévenir les irritants inutiles.

Rien n’interdit à un promoteur de consulter le milieu de sa propre initiative. Cela pourrait même lui donner des munitions face à des fonctionnaires parfois mal alignés avec la réalité du terrain, comme cela semble avoir été le cas dans la situation vécue par le client de Pierre Bouchard.

J’assistais hier à une conférence donnée par Florence Junca-Adenot devant le CIRANO. Elle disait précisément cela (et pourtant elle n’a pas étudié en relations publiques que je sache!) : Il faut associer la société civile à la définition des projets très tôt, avant même de trop les avoir définis.

Il est faut de prétendre que la population ne désire aucun développement. Il y aura évidemment toujours des oppositions à tous les projets, mais aussi beaucoup de soutien. Le débat public sur les projets grands et petits fait maintenant partie de la réalité des promoteurs. Raison de plus pour prendre les choses en mains plutôt que de se laisser dicter une approche unique.

Qu’en pensez-vous?



lundi 3 mai 2010

Les relations publiques et le développement durable

Les approches conventionnelles de gouvernance ne conviennent pas à la recherche de solutions en matière de développement durable. Il faut mettre en œuvre des processus plus collaboratifs afin de sortir des habituelles oppositions entre les intérêts économiques, sociaux et environnementaux. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie (TRNEE) et le Forum des politiques publiques, deux organismes relevant du gouvernement fédéral, dans une publication très récente (mars 2010), «Le progrès grâce aux processus». Ce document d’une quarantaine de pages est facilement accessible via le site web de la TRNEE.


«Nous devons retourner aux sources et reprendre le dialogue, afin de transformer le goût du dialogue et de la discussion en des processus acceptables et efficaces pour la gouvernance du développement durable» peut-on lire dans le message d’introduction signé par les présidents de ces deux organismes.

La TRNEE a constaté depuis longtemps que les mécanismes décisionnels traditionnels tendent à exclure et à opposer les intérêts divergents alors que, au contraire, une véritable démarche de développement durable nécessite une approche intégratrice. Il faut développer de nouveaux processus basés sur le mode collaboratif.

S’adressant aussi bien aux gouvernements qu’aux groupes d’intérêts, les deux organismes affirment qu’il faut «apprendre à exercer le pouvoir différemment», savoir dégager des intérêts commun, respecter les règles d’un dialogue véritable dans la construction de relations de long terme basées sur la confiance. On ne demande pas aux participants d’abandonner leurs positions et leurs pouvoirs, mais plutôt de laisser leurs armes au vestiaire lorsqu’ils entreprennent un dialogue, et d’assumer chacun une partie de la responsabilité dans la mise en œuvre des solutions résultant de ce dialogue.

On est loin ici de la consultation traditionnelle où les gouvernements, après avoir écouté les organismes, décident seuls et où les organismes jouent aux gérants d’estrade.

«Dans un tel processus de collaboration, les participants apprennent un dialogue en trois étapes : l’expression des points de vue, la délibération et la prise de mesures. Au troisième stade, plutôt que de redonner au gouvernement la tâche d’instaurer des solutions, les participants collaborent afin d’attribuer les rôles et les responsabilités selon la personnalité ou le groupe qui leur semble le mieux placé pour accomplir une tâche particulière… Le résultat est un plan d’action qui répartit les rôles et les responsabilités entre tous les participants, et qui établit une responsabilité commune quant aux résultats.»

Les 20 personnes qui ont participé aux travaux ayant mené à la production de ce rapport sont des hauts dirigeants de la fonction publique fédérale et de divers organismes de représentation économiques et environnementaux. Aucun ne provient de l’univers des relations publiques. J’y vois à la fois un signe encourageant et un défi.

Il est encourageant de constater que ces personnes éminentes, en principe branchées sur les défis de l’avenir et sur cette notion féconde entre toutes qu’est le développement durable, dégagent de leurs travaux la nécessité d’adopter des processus «collaboratifs» évoquant très fortement, et souvent très directement, des concepts fondamentaux des relations publiques modernes, notamment le dialogue, le respect mutuel, la mise en place de mécanismes de communication continue, la recherche de solutions communes.

Mais lorsque l’on constate que les mots «relations publiques» n’apparaissent jamais dans le document, on prend la mesure du défi que représente toujours la «légitimisation» des relations publiques. Ce défi, c’est à nous de le relever. En affirmant haut et fort que les processus collaboratifs prônés par les deux organismes fédéraux trouvent des bases solides dans la théorie moderne des relations publiques et dans la mise en œuvre de cette théorie par des relationnistes professionnels.